#randonnée
Quel est le bruit de la solitude, sinon l'incessant tambour du train de pensée sur les rails de sa conscience?
On dit que pour écrire, ça doit se faire dans la solitude (Rilke l'a dit). Chaque mot doit provenir de la profondeur de ses moments seuls. Et si on tente de partager cette solitude?
Qu'est-ce qu'écrire? Qu'ai-je à dire? Qu'est-ce qui me pousse à vouloir laisser sur papier des lignes et des mots provenant de mon moteur à penser? Ai-je avantage à faire ceci? Ça débouchera pas, mais tu ne le fais pas pour ça de toute façon. Écrire, c'est pour le goût d'écrire, pas pour quelconque avantage matériel ou irréel. Ce n'est pas pour gagner son pain ou une amie.
Écrire, c'est penser, que disait quelqu'un. Il ne sert à rien d'essayer d'utiliser des mots compliqués si c'est pour exprimer ses pensées. Et apparemment, ça peut prendre bien des années avant de trouver les mots exacts, de toute façon.
Un chien, deux chiens. Ils tournent autour de moi et réquisitionnent un moment de jeu. Qu'est-ce qui est si paisible avec cette station LA? C'est la proximité de la nature, ==le calme volontaire==. La douceur contrôlée. La beauté peaufinée. Avoir le droit d'être ici et de ne pas être pressée.
Qu'y a-t-il de si beau dans la contemplation? J'ai vraiment l'impression que c'est là que je me plais le plus. Contempler en nature. Contempler en montagne. Contempler en hauteur. Contempler mon plafond.
Contempler les tourbillons de crème dans mon café. Les ronds et les tortillons, les pirouettes chaotique laiteux dans la profondeur du noir café. Le brun naissant de la dilution des pigments blancs. Les spirales nées des profondeurs de la tasse. Nées, issues, créées, naquises, émergentes, cultivées, maçonnées, poussées.
Mon doux, tant de mots. Comment les apprivoiser? Si chacun d'eux ne sert aucun autre sens que de conserver le sens qu'on leur donne. Est-ce des coquilles vides ou des plaques tectoniques se mouvant lentement, portant avec eux les multiples étages de culture calcifiée, s'alimentant des tumultes de magmas populaires et déportant les sens comme des roches portées par les glaciers? S'il n'eut qu'une invention auquel j'adhère des époques précédentes, c'est celle de l'écriture. C'est avec elle que ma vie a vraiment commencée. Avec le calepin rouge — Ô merci Audrey-Ann.
Combien voudrais-je être capable de tout écrire ce que je ressens. Déposer des mots et avoir une certitude que je me suis bien exprimer. C'est impossible, évidemment. Bonne chance si c'est ainsi que tu perçois les mots. La vie est criblée de systèmes qui sont si complexes et entremêlées; les *rhizomes* de Deleuze. S'en est drôle de penser que tu es capable d'en apprivoiser le sens. Comme le petit prince a appris à connaître le renard. S'en est ridicule, même. Suffit-il d'en prendre une racine et de l'explorer, parcourant le labyrinthe de la maison des mots, de l'espace (infini?) des phrases et de la tour de Babel des textes linéaires? Je suis le premier à savoir que l'infini, c'est grand. On a le temps de devenir fou avant d'en avoir explorer le premier 1\% — et de toute façon, $\frac{1}{100}\cdot \infty = \infty$. En fait, c'est aussi long parcourir le premier millième que d'en parcourir l'entièreté. C'est même aussi long d'en parcourir le double que d'en parcourir une poussière de fraction.
J'ai croisé beaucoup de gens dans ma vie. Je m'épate de croiser des individus qui me surprennent avec leurs pensées. Un être humain qui trouve constamment plaisir à penser et un autre qui a peur de réfléchir pendant plus de 5 secondes ont quelque chose de fondamentalement différents. Les êtres humains sont égaux, mais les cerveaux ne le sont pas. Richard Feynmann a peaufiné son esprit et son cerveau toute sa vie. Je doute que le Simon du dépanneur aie un esprit comparable à cet homme.
Comment agencer les mots et les mathématiques? Est-ce une tâche possible? Ce serait de parcourir un monde que je connais bien, et qui est si subtil à partager; si difficile à faire comprendre aux autres.
Au lieu d'appeler ça des mathématiques, peut-être devrais-je appeler ça du **gros bon sens**. Le gros bon sens des gens « intelligents ».
Tient, prend l'exemple de $14+13$. C'est simple comme addition. Le gros bon sens dit que ça donne $27$. Le **gros bon sens**, lui, il dit que c'est pas si simple que ça. Regarde: $14\!:\!00 + 13 {\rm~heures}$. Ça donne pas $27$. Non, ça donne $3\!:\!00,$ soit trois heure du matin le lendemain. Qui l'eut cru qu'une simple addition pouvait avoir plusieurs sens. L'art du **gros bon sens**, il te dit qu'on peut jouer avec les nombres de différentes façons. C'est l'art de créer des structures communes appliquées à des choses différentes.
Pssst, je vais vous offrir un secret et une *évidence* bien gardé.... Le **gros bon sens** n'a jamais réussi à définir parfaitement, à établir hors de tout doute, à constater sans équivoque:
> qu'est ce qu'un nombre?
Non, bien sûr, parce que le concept de nombre existe depuis si longtemps qu'il échappe à notre filet logique. On l'a utilisé avant de le définir, alors il ne se définit pas. La plaque tectonique nous file sous les pieds à vive allure. Ça veut dire un point dans l'espace des nombres réels. Ça veut dire l'élément d'un ensemble quelconque. Ces concepts, ces définitions formelles se font passer pour un nombre, perdant ainsi, par le lien transitif et monotonement décroissant du passage de l'information à travers l'application de la fonction $\rm Synonyme: Vocabulaire \to Vocabulaire,$ un peu de certitude.
Pourtant, tu sais ce que je veux dire quand je dis que le *nombre* de mots dans cette page est de plus de $947$. Et pourtant encore, la « chose » suivante serait aussi un nombre selon le **gros bon sens**:
$ {\huge i}.$
\- Eh, mais c'est une lettre, pas un nombre!
\- Non, c'est un nombre. Pour moi, en tout cas.
\- Balivernes! Au pieu! Sorcellerie!... Quel nerd!
Sorcellerie et **gros bon sens** sont si près l'un de l'autre pour le commun des moldus. Et pour tous ceux qui lisent ceci - c'est-à-dire personne? - si vous ne comprenez pas le **gros bon sens**, alors tant pis pour vous. Ce nombre, $i$, est indiscutablement réservé aux magiciens du **gros bon sens**. Si vous ne comprenez pas, toutes mes félicitations, vous êtes fier élu du Fabuleux et Inconcevable Groupe des Gens Ordinaires. FIGGO, pour les surdoués.
Le trivial se vente de ne pas aimer le **gros bon sens**. C'est comme faire partie d'un club dont tout le monde fait partie. Tout le monde de normal. Tout le monde qui « ont eu une vie » à l'école secondaire. Passé 60 ans, ce tout le monde a *probablement* une bedaine bien remplie et un cerveau qui vie dans un monde plein de $i$. Un monde imaginaire. Probablement qu'ils s'imaginent que la réalité est faite de oui et de non.
Moi, dans ma tête, la réalité est faite de nombres réels — à virgules — compris entre $0$ et $1$. Exclusivement, et ce mot est appliqué tant au début qu'à la fin de cette dernière phrase. Ceci est la logique que j'ai adopté. La logique issu du **gros bon sens**. C'est dur d'expliquer à ce quelqu'un, cette personne pour qui le noir et le blanc sont présents au quotidien, que je ne vois qu'un gamut de gris et de couleur, et que chaque concept, chaque fait, chaque théorie se joint à un immense réseau, un graphe pondéré par des probabilités. Que je ne vois qu'une infinité de racines entremêlées et pour lesquelles en parcourir qu'un pourcentage me prendrait plus de temps que de compter jusqu'à $-\frac{1}{12}$. Et tout ça se retrouve si coloré que s'en est assourdissant de vivre. Et je n'accepterai pas de croire que je suis la personne bizarre.
\- Balivernes!